Tout au sud du cône sud-américain, partagée entre l'Argentine et le Chili, la Patagonie a toujours été le symbole du bout du monde pour tous les voyageurs d'hier et d'aujourd'hui.
Et c'est vrai que c'est une terre qui se mérite, par la sauvagerie de son climat, l'immensité de ses étendues qui rappellent la Mongolie, et le refus obstiné de son sol à se prêter à la moindre culture.
Un tel territoire n'est pas à la mesure de l'homme. Ses côtes inhospitalières sont sur le passage des 40èmes Rugissants tant redoutés des navigateurs, qui se dépêchent de passer le Cap Horn, trop heureux de pouvoir s'éloigner de cet enfer pour vouloir tenter d'y aborder...
Le voyageur attiré par cette nature vertigineuse doit se trouver un compagnon de voyage et d'aventure, et ce compagnon a toujours été le cheval.
La Patagonie, façonnée par l'homme à cheval - le Gaucho
Si la Patagonie a eu une influence décisive dans l'évolution de la morphologie du cheval jusqu'à la naissance du cheval Criollo, l'inverse est également vrai.
Sous la selle des Gauchos, l'équivalent sud-américain des cowboys, le cheval a modelé les paysages de Patagonie, transformant ces pampa sauvages en vastes terres d'élevages, rassemblées en estancias.
Ces grands ranchs peuvent atteindre plusieurs dizaines ou centaines de milliers d'hectares, et se consacrent à l'élevage du bétail au nord de la Patagonie, et à l'élevage du mouton au sud de la Patagonie.
Chaque estancia a dû s'organiser pour fonctionner quasiment en autarcie, tirant son électricité des rivières sur lesquelles elles installent de petites installations hydroélectriques, ou du vent grâce aux éoliennes.
Les hommes qui affrontent ces conditions de vie rudes ont eux aussi un caractère bien trempé, mais partagent une solidarité sans faille, indispensable à la survie mutuelle.
Les Gauchos forment ce qu'ils appellent une Patrie qui dépasse les frontières des Etats d'Argentine et du Chili, avec leur propre culture, basée sur les chevaux et la lutte permanente avec les force brute de la Patagonie.
Le cheval Criollo, façonné par la Patagonie
Débarqué avec les Conquistadores, le cheval Espagnol a dû affronter des conditions climatiques très différentes de celles de son Andalousie natale.
Une sélection naturelle drastique au cours des siècles, couplée à un élevage orienté vers le travail du bétail et les longues chevauchées dans la pampa ont donné naissance au cheval Criollo.
Plus petit que ses ancêtres espagnols, très rustique et résistant, tout en muscle, le cheval Criollo s'est parfaitement adapté à l'environnement rude de la Patagonie, dans laquelle il est élevé en grande partie en liberté, laissé à lui-même pendant les difficiles mois d'hiver. Comme en Mongolie, le climat extrême a créé un cheval extrême !
Les différents visages de la Patagonie
Il n'existe pas qu'une Patagonie. Même si le point commun de cette immense région reste la rudesse du climat, on peut distinguer plusieurs zones très différentes.
La première séparation qui saute aux yeux est la frontière entre l'Argentine et le Chili, bien sûr. De chaque côté de la frontière, les gauchos se donnent des appellations différentes : baqueanos, huasos... et on peut remarquer des spécificités dans les selles et le harnachement.
Le côté chilien est plus montagneux, la plaine entre la Cordillère des Andes et l'océan étant plus étroite que côté argentin.
On le voit, il existe une Patagonie des plaines et une Patagonie des montagnes : les Andes forment une frontière naturelle difficilement franchissable, dont le centre est occupé par un champ de glace infranchissable qui déverse ses glaciers énormes dans des lacs aux eaux glaciales.
S'il existe des estancias qui s'accrochent à ces montagnes hostiles, la Patagonie des montagnes reste essentiellement sauvage et inhabitée. Des parcs naturels y ont été créés pour préserver ces espaces exceptionnels, comme à Torres del Paine au Chili ou au glacier du Perito Moreno en Argentine. C'est maintenant le territoire de la randonnée à cheval.
La Patagonie des plaines - et de la pampa - est le territoire de prédilection des estancias et des grandes exploitations d'élevage.
Une autre distinction est également à faire entre le Nord et le Sud de la Patagonie : au nord, le climat est plus clément, des forêts d'araucarias peuvent se développer sur les pentes des volcans, il est possible d'élever des bovins, alors qu'au Sud, seuls quelques arbres rabougris arrivent à résister au vent incessant sur ces terres qui ne peuvent nourrir que des moutons.